Inclure ses auditeurs : le pari d’une radio nantaise

Juil 4, 2018 | Articles | 0 commentaires

Suzon Tisseau

Arnaud Gruet

À Nantes, la radio associative Le Son Unique (SUN) affiche l’ambition d’intégrer ses auditeurs à toutes ses démarches. Qu’il s’agisse de la programmation musicale ou des émissions, le public de SUN est très souvent sollicité.

Des câbles jonchant le sol, les étagères sont remplies d’ordinateurs désossés, lorsqu’on pénètre dans la rédaction du SUN, on se croirait dans un laboratoire d’informaticiens. Et ce n’est pas complètement faux. Dans ces locaux du centre-ville de Nantes est née, en 2014, l’application MySun. Cette technologie, unique en France, a pour principe de laisser la programmation musicale de la radio aux mains des auditeurs. Depuis un ordinateur ou un smartphone, n’importe qui peut sélectionner une musique dans la base de données du Son Unique et choisir quand elle sera diffusée. La prouesse réside dans l’automatisation du procédé. Dans le studio, c’est le logiciel seul qui gère ces demandes.

En 2016, le directeur et fondateur de SUN, Pierre Boucard, va plus loin. Son application est refaite à neuf et propose de nouveaux flux d’écoute. En plus de l’antenne classique, l’auditeur peut basculer en un swipe sur un flux dédié aux retransmissions sportives, un autre consacré aux directs en dehors des studios, ou bien des flux ne diffusant que de la musique métal ou des chansons de Noël – au mois de décembre du moins.

Bidouilleur dans l’âme, Pierre Boucard explique sa philosophie pour une radio qui a toujours cherché à utiliser les outils technologiques existants afin de proposer une offre unique.

 

Aujourd’hui, la direction du Son Unique considère que l’auditeur peut et doit avoir toutes les clés en main pour consommer le contenu radiophonique qui lui correspond.

Des auditeurs consultés

L’image de « geek de l’informatique » s’efface une fois passées les portes du studio. Ambiance pastel et tamisée, une grande étagère remplie de livres et de disques, l’atmosphère classique de la radio est plus prégnante. Les lieux ont été repensés en 2017, en même temps que l’identité graphique du média, jugée obsolète.

Même si l’identité visuelle est signée des graphistes nantais Bleu Neon, les auditeurs sont, eux, à la conception de cette refonte. Un questionnaire leur a été envoyé pour comprendre la perception qu’ils se font de SUN. Pour l’équipe de communication, il était important d’identifier, selon leur public, les points clés de la radio afin d’asseoir un label plurimédia. Les animateurs proposent, en ce sens, de délocaliser l’antenne au coeur des lieux de vie des Nantais.

Interagir avec son public

En 2016, le journaliste indépendant Florent Bouchardeau suggérait cette idée à SUN. Au mois de septembre, il lançait son émission culturelle et musicale « Les oreilles d’Anne ». Une fois par mois, la radio investit un bar ou une salle de spectacle pour y produire une tranche de deux heures. « C’est un moment de rencontre avec le public », raconte le journaliste. Ce « gros défi » implique une écriture d’émission particulière. « C’est complexe car les formats doivent intéresser et permettre une interaction avec les personnes sur place. »

Outre un dialogue simplifié avec les auditeurs, « Les oreilles d’Anne » apporte du lien supplémentaire entre Le Son Unique et les acteurs culturels de la métropole nantaise. « On est sur une énergie de spectacle live, au-delà de l’émission radio en tant que telle », pense Florent Bouchardeau. « Être délocalisé, ça change tout. »

C’est ainsi que depuis plus de vingt ans, la radio SUN s’est construite : en mettant la technologie au service de la territorialisation du média radiophonique, c’est-à-dire au service de la population.