Que ce soit le match de foot de district ou les portraits de jeunes membres des associations sportives, les médias entretiennent une relation privilégiée avec le tissu social. Une occasion de promouvoir également une autre vision de la pratique physique, plus douce et moins compétitive.
Le quotidien Ouest-France compte quatre cents correspondants de presse qui couvrent le sport au niveau local. Avec une attente forte de la part du lectorat : « Si on ne publie pas une analyse d’un match de première division, personne ne va nous le reprocher, raconte Vincent Coté, rédacteur en chef délégué aux sports à Ouest-France. Mais si on oublie de sortir le compte-rendu d’un match au niveau local, il y aura du courrier des lecteurs à ouvrir ! » La relation entre sport et médias au niveau local tient de la symbiose.
Le sport au-delà des résultats
Depuis quelques temps toutefois, le lectorat manifeste une appétence pour une couverture plus originale du sport, qui relève plutôt des pages Société d’un journal. Insertion par le sport, pratiques adaptées pour les personnes en situation de handicap ou encore activité physique orientée vers le loisir, ces sujets fleurissent et rencontrent un succès d’audience. C’est dans cette optique qu’a été créée la Fédération Française Sport pour Tous, qui mise moins sur la mise en avant des athlètes que sur la fonction de socialisation du sport. « C’est une initiative intéressante, car d’habitude on se retrouve très vite avec un tiers de foot, un tiers de foot et, quand on ne sait pas quoi mettre dans le dernier tiers, on met du foot dans le doute », plaisante Vincent Coté. « Le sport, c’est aussi l’occasion pour les femmes atteintes d’un cancer du sein de retrouver de la mobilité par exemple », raconte Aurélie Peyridieu de l’Association Française Sports pour Tous.
Clément Chassot, rédacteur en chef de l’hebdomadaire local Le Crestois, est attentif au rôle social de l’information sportive : « Parfois, cela aide les clubs à faire entendre leur projet quand ils ont des travaux à faire. » Pour le journaliste, le sport permet de tisser des liens, et les médias peuvent contribuer à dynamiser et encourager les événements. « Ceux qui pratiquent le sport, ce n’est pas que Kylian MBappé, c’est aussi Monsieur et Madame Tout-le-monde qui se retrouvent avec leurs amis », rappelle Aurélie Peyridieu.
De nombreux français déclarent pratiquer une activité physique régulière, majoritairement pour des raisons de santé :
Le sport amateur comme refuge
« Le journal, c’est un réseau social papier », défend Clément Chassot, en réponse aux discours qui prophétisent la disparition de ce support. En outre, la couverture du sport au niveau local permet de retrouver une certaine authenticité dans la pratique. Pour Vincent Coté, les journalistes n’ont plus accès aux joueurs professionnels, « pris en otage », et qui ne peuvent plus parler de leur vécu. Couvrir le sport amateur permet de promouvoir une pratique avec d’autres ressorts que la performance ou la popularité, et de renouer avec des fondamentaux du sport.
« Les belles histoires se trouvent dans le sport amateur », proclame le rédacteur en chef adjoint aux sports de Ouest-France. D’où l’importance de l’armada de correspondants mobilisés par le journal. Le Covid a en ce sens été un grand révélateur de l’intérêt de la couverture du sport local. Ce fut l’occasion, selon Vincent Coté, de mettre en lumière une autre facette de l’humain et de médiatiser le sport féminin, jusqu’ici invisibilisé.
Parfois, couvrir un club local peut relever du numéro d’équilibriste. Les associations sportives sont des relations privilégiées pour les médias locaux, et il peut être difficile de les remettre en cause. « Comment traiter les actions d’un club avec un angle négatif quand la ligne éditoriale de notre journal est de valoriser le territoire ? », s’interroge Clément Chassot. Un équilibre précaire pour la couverture du sport local, encore complexifié par les coûts du papier : « Il serait illusoire de croire que l’on va ouvrir de plus en plus de pages dédiées au sujet, conclut Vincent Coté. Pour autant, le sport amateur n’est pas prêt de tirer sa révérence. »
Élian Malric
Enrichissement : « Au FC le Crestois, la dimension sociale compte »
Édouard Nonmoira