Médias en 2019 : comment se lancer ?

Mar 16, 2019 | Articles, Assises | 0 commentaires

Programmes d’incubation, crowdfunding : aujourd’hui, créer son média semble à la portée de tous. Des centaines d’initiatives fleurissent tous les mois, en ligne et en version papier. Mais à l’heure où tout le monde veut créer son média, comment se démarquer et sortir du lot ? Réponse avec des journalistes qui se sont lancés cette année et qui sont venus présenter leur projet aux Assises du journalisme.

 

Louise Ginies

« C’est très compliqué de se projeter car on est encore un projet tout neuf. Mais bien sûr, on espère que cette aventure va durer le plus longtemps possible. » C’est la réponse de Nina Gheddar, rédactrice en chef du média 100% web Guiti News, lorsqu’on l’interroge sur l’espérance de vie de son projet. La jeune journaliste est sortie de l’école il y a cinq ans, et a récemment quitté son CDI dans un grand groupe parisien (dont elle a volontairement tu le nom) pour se consacrer à la création de son propre média. « Quand on est jeune journaliste, on arrive avec plein d’idéaux sur la façon dont on veut pratiquer le métier. Mais très vite, c’est la désillusion. » La jeune femme s’est rapidement sentie restreinte dans son travail. Après une rencontre avec le journaliste afghan Mortaza Behboudi, Nina, depuis longtemps sensible aux questions sociétales concernant les migrants, a pris la décision de se greffer à lui pour créer Guiti News.

 

Une « aventure humaine » qui prend du temps et de l’argent

Le site a été lancé le 22 janvier dernier, suite à un programme d’incubation parisien qui a duré six mois, entre juillet 2018 et février 2019. « Ce programme nous a permis d’avoir un local, un community manager pour nous positionner sur les réseaux sociaux, mais aussi un accompagnement administratif. » Un passage chez France Inter a également permis d’attirer de l’audience.

Pour l’instant chez Guiti News, tous les journalistes sont bénévoles. « Guiti News a pour le moment le statut d’une association. » Le média n’est pas encore rentable et les journalistes ne tirent pas de salaires de leur activité. Les premiers financements sont arrivés à la suite d’une campagne participative de 6000 euros, qui nous a permis d’acheter le matériel de base. C’est-à-dire de quoi s’installer, filmer, monter, etc. Guiti News a aussi reçu l’aide de syndicats et de structures, qui sont nombreuses à apporter leur aide à de nouveaux projets.

En persan, guiti signifie « le monde et ce qui l’entoure ». L’équipe est constituée de cinq journalistes français et cinq journalistes réfugiés qui fonctionnent en binômes pour chaque article et chaque contenu publié. Le média porte ainsi un double regard sur l’actualité nationale. Tous les sujets de Guiti News sont traités au prisme de la migration. Les sujets touchent à tout : société, culture, etc. « Nous voulons humaniser les migrants », affirme Nina. Guiti News souhaite diversifier son audience en s’exportant à l’international : le Canada, Israël, la Réunion. Le plurilinguisme des journalistes est très important pour le développement du média, selon la rédactrice en chef.

Nina Gheddar a pour l’instant deux casquettes : la rédaction en chef, très chronophage, mais aussi la recherche d’investisseurs pour continuer de financer le projet. Elle attache une grande importance à la source des financements : « Je veux que mes financeurs soient raccord avec la ligne éditoriale de Guiti News. »

 

« Personne ne m’a jamais dit que monter mon média serait facile »

Aude Lalo a elle aussi lancé son magazine en 2018 : Flush. Sa ligne éditoriale : toilettes, culture et société. Ancienne étudiante en école de commerce, elle a mis la main à la poche pour concrétiser son projet. Elle démarre avec 50 000 euros, le « strict minimum » selon elle pour pouvoir concevoir un magazine de bout en bout. Contrairement à Guiti News, Aude Lalo parie sur la presse papier. « On a déjà réussi à sortir deux numéros, c’est une performance ! », s’enthousiasme la fondatrice du magazine. Elle ambitionne aujourd’hui de mettre en place un site internet d’actualité. Mais avant tout, elle doit asseoir sa marque et pérenniser Flush. Et si ça ne marche pas dans la durée, pas de panique. « L’échec est vertueux », lance-t-elle. Et permet aux plus déterminés de toujours se relancer.