Education aux médias et à l’information chez les jeunes : pourquoi ça coince ?

Mar 15, 2019 | Articles, Assises | 0 commentaires

Ce mercredi, la 12ème édition des assises internationales du journalisme s’est ouverte à Tours, avec une première journée dédiée à l’éducation aux médias et à l’information. L’occasion de faire le tour des initiatives mises en place et d’aborder les difficultés rencontrées en matière d’éducation aux médias, notamment chez les jeunes.

Mélanie Blanquet

En France, on estime que 76% des 12-17 ans sont actifs sur au moins un réseau social. Souvent peu conscients des mécanismes utilisés par ces réseaux et plus crédules que leurs aînés, les adolescents sont des cibles privilégiées pour la dissémination de fausses informations, la cession de données personnelles et autres pièges sur le net. L’éducation aux médias et à l’information est donc devenue l’un des enjeux du numérique pour les années à venir.

 

« Profs d’éducation aux médias », des débuts laborieux et inégaux

Dans certaines régions, des travaux ont déjà été menés pour sensibiliser les étudiants à la manière de s’informer, notamment sur le web, mais aussi sur le métier de journaliste. C’est notamment le cas dans l’Oise, ou la Ligue de l’enseignement intervient auprès des classes, grâce à un outil, l’application Les Veilleurs de l’info (insérer lien hypertexte). Téléchargeable gratuitement par les enseignants, elle propose des fiches ressources à imprimer et offre un véritable accompagnement pour le professeur. Pour Olivier Magnin, délégué du pôle éducation aux médias de la Ligue, ce programme part d’un constat simple : « les professeurs sont en demande d’outils, mais ils n’en ont pas les moyens. En plus on leur demande de suivre des formations sur leur temps personnel. C’est compliqué, mais ils sont tous de bonne volonté ».

Le constat est partagé par Maïka Seguin, chargée du développement éducation aux médias et à l’information en région PACA, mais avec une petite nuance : « les profs manquent de formation, et ça pose parfois problème. Quand on intervient dans des classes, il arrive qu’on finisse par demander au prof de sortir. Certains peuvent être contreproductifs, là aussi c’est compliqué, même si on sent qu’ils veulent bien faire. ». Si certaines régions ont pu, grâce à des subventions, mettre en place des programmes adaptés, le travail reste laborieux, tout comme il l’est dans les médias.

 

Un modèle numérique gratuit pour nos jeunes ? 

Aux assises du journalisme, la presse jeunesse était au rendez-vous, pour évoquer notamment le rapport du jeune lectorat avec les journalistes et l’information. Pour Frédéric Fontaine, rédacteur en chef de Géo Ado, on ne peut plus, aujourd’hui, se contenter des médias papier pour les nouvelles générations. Pour lui, « il faut aller les chercher là où ils sont », raison pour laquelle la version ados de National Geographic a mis au point un site internet, où les jeunes peuvent s’exprimer, mais aussi avoir un lien avec les journalistes. Pour le rédacteur en chef, c’est par le dialogue que tout commence.

Mais il n’est pas forcément évident de trouver un modèle économique stable pour la numérisation de la presse jeunesse. C’est ce qu’a souligné Olivier Voizeux, rédacteur en chef du magazine Sciences et Vie junior : « les enfants sont des consommateurs indirects, ils dépendent de leurs parents. ». Pour lui, il est beaucoup plus difficile de faire souscrire les parents à un abonnement : « on doit se contenter du modèle de la gratuité. C’est une situation pour l’heure sans issue ».

David Groison, rédacteur en chef du magazine Phosphore, pointe, lui, les limites du gratuit : « Sur le net, on dépend des annonceurs, et il est vraiment difficile de trouver des annonceurs qui sont en phase avec la pédagogie que l’on veut mettre en place sur le site. On ne veut pas de pub Coca Cola, par exemple ». Phosphore s’est finalement dirigé vers YouTube, l’un des réseaux sociaux privilégiés par les jeunes, pour aborder des thèmes tel que l’intime, les métiers, etc.

Au Monde des Ados, on s’interroge également sur le modèle à suivre en ligne : « une présence sur les réseaux sociaux implique une augmentation des effectifs, et chez nous, c’est compliqué », indique Marion Gillot, rédactrice en chef. Le média a donc choisi la sûreté, en proposant quelques collaborations avec la chaîne YouTube Hugo Décrypte, plébiscitée par les ados.