À l’heure où la plupart des compétitions sportives sont diffusées sur des chaînes payantes, France Télévisions fait de la résistance et s’applique à conserver le droit de diffuser plusieurs manifestations sportives d’importance majeure.
Le championnat de Ligue 1 retransmis sur une chaîne publique? Impensable à l’heure où la Ligue de Football Professionnel aspire à vendre les droits de sa compétition pour plus d’un milliard d’euros. Bien loin de l’explosion du montant de ces droits de diffusion, France Télévisions mise surtout sur des compétitions historiquement accessibles au plus grand nombre. Certaines doivent d’ailleurs légalement être diffusées sur une chaîne gratuite, afin d’être visibles “par tous les téléspectateurs afin de ne pas priver une partie importante du public de la possibilité de les suivre”.
En termes de football, TF1 se charge de diffuser la finale de la Ligue des Champions, de la Coupe du Monde et de l’Euro ; mais pour d’autres évènements, le service public prend le relais. C’est notamment le cas lorsqu’il est question de diffuser les Jeux Olympiques (d’hiver et d’été), le Tournoi des 6 Nations, le Tour de France ou les Championnats du monde d’athlétisme (entre autres).
L’intérêt pour France TV n’est pas seulement de répondre aux demandes de l’ARCOM (Autorité de Régulation de la Communication Audiovisuelle et Numérique – anciennement CSA). L’objectif est surtout d’entretenir la tradition d’un service public qui rend accessibles des compétitions historiques auxquelles les Français attachent une importance certaine. D’autant que cet attachement des spectateurs à la diffusion gratuite de manifestations sportives comme la Grande Boucle se traduit souvent dans les audiences. En témoigne le nouveau record cumulé établi en juillet 2023 avec plus de 42.5 millions de Français qui ont regardé le Tour. En tant que l’un des bastions historiques du sport gratuit à la télévision française, il fait bondir chaque année les audiences de France TV, confirmant son statut singulier dans le paysage audiovisuel français.
Le tournoi des 6 Nations, lui aussi, est une valeur sûre qui se trouve dans le giron du service public depuis 1994. Si des records d’audience peuvent être battus lorsque les performances du XV du Coq passionnent les foules – 9.1 millions de téléspectateurs se sont réunis pour la démonstration française face à l’Angleterre en mars dernier (53-10) – les téléspectateurs ont toujours montré un intérêt particulier pour le 6 Nations. Derrière les Bleus, un public friand d’un sport “qui a une image premium, joue de ses valeurs et a toujours été précurseur en termes d’exposition télé”, selon Marine Lallement, co-autrice d’un rapport annuel sur les sports les plus diffusés.
La couverture intégrale des Jeux Olympiques d’hiver et d’été étoffe encore un peu plus la panoplie sportive de France TV. Tous les deux ans, ces événements, dont la dimension planétaire est semblable à celle du Tour de France, réunissent des dizaines de millions de Français devant leur écran. Quel que soit le sport diffusé, les JO sont fédérateurs et appellent à la fibre affective de chaque spectateur: lorsqu’il est question de soutenir un Français dans son sport, les subtilités de la discipline passent presque au second plan tant l’important est de voir l’athlète tricolore l’emporter. A eux-seuls, les Jeux de Tokyo (2021) ont réuni plus de 50 millions de passionnés tandis que ceux de Pékin (2022) en ont rassemblé plus de 45 millions.
Pour France TV, la diffusion gratuite de telles compétitions est une manne de spectateurs certaine en plus d’être un moyen d’affirmer son identité d’un service public qui rend accessible au plus grand nombre la diffusion de manifestations sportives importantes. Cependant, les logiques économiques ne sont pas éclipsées pour autant: France TV vient de se retirer de la diffusion du Dakar, course automobile qui disparaîtra complètement de ses antennes en 2026. De la même manière, sans pour autant abandonner totalement la terre ocre de la Porte d’Auteuil, le groupe a perdu une partie des droits de Roland-Garros depuis 2021. Habitués à voir de la terre battue à la télévision fin mai, chaque spectateur espèrera que la diffusion gratuite du Grand Chelem parisien résistera à la logique économique.